lundi, 15 septembre 2008

Troms et la laponie norvégienne...

De retour sur le continent je me suis fait un chouette copain... Au bout d`un moment il s`est fait rappeler à l`ordre par sa maman... Mais dans ses yeux j`ai bien eu le temps de lire son envie de monter sur mon porte bagages pour venir faire un tour...

Et il était encore temps de se baigner dans le jour éternel...

Étant donné que ma chaussure laissait voir la chaussette j`ai donc monté le fameux XD - HardCore to the bone et fait quelques prières pour voir s`il tient les non moins fameuses 7 k bornes promises par le vendeur... La Ferraroli a pris des allures de tracteur... Mais nous ne sommes pas là pour un concours de style... Ou bien ?

A quelques bornes de Tromso, pendant que je remplaçais, pour la deuxième fois, mon câble de vitesses arrière, je vois arriver 4 bolides... "Les 4 suédois volants"... Partis de Tanun (le fameux endroit où les "old bikers" écrivaient des mails au burin dans le roc), ils ont mis 14 jours pour faire ce que j`ai fait en deux mois... Coté moyenne ça doit faire du 200 bornes/jour... Correct... Pas mal... Honnête...

Fiers héritiers des burins de leurs ancêtres, il n`hésitent pas à user de la force brute pour réparer ce qui a besoin de tenir jusqu`à la mort... On reconnaît là les vrais dompteurs de l`asphalte !

Avec ma Ferraroli, qui a toujours ses jambes en l`air pour se faire tripoter le dérailleur arrière, nous n`avons pas pu nous empêcher de sourire lorsque ces braves dégommeurs de bitume nous avouent humblement qu`ils sont dégoûtés de pédaler et qu`ils en ont marre d`avoir le cul sur une selle... Tu m`étonnes... J`ai oublié de leur demander s`ils avaient eu le temps de dormir un coup ou de pisser un verre...

Plus loin, face aux fameuses Lyngenalps, à l`écart des touristes avides de tirer un "run" hivernal dans ses pentes abruptes qui se jettent à la mer il existe encore des artistes qui travaillent la terre dans des proportions qui feraient sourire les gestionnaires des latifundios Ibériques...

Et pas loin de là, pour la fête nationale (Suisse), à 11h50 précises, j`ai pu bénéficier d`un discours céleste dont un politique aura bien du mal à égaler la beauté sur la plaine du Rütli. Et la nature elle même nous fourni le meilleur filtre solaire que l`on puisse imaginer pour visualiser ce joli cadeau de la loi gravitationnelle... La chape de plomb... Ça nous fait quoi... Un petit 75% de couverture ?

Et toujours plus loin, au nord est de Tromso, ça fait un bail que t`as laissé derrière toi le 66 ème dégrée du cercle polaire arctique... Et tu comprends l`ampleur de ton malheur lorsque, pendant la traversée qui te mène de Lyngseidet à Olderdalen, le gamin de 10 ans assis à coté de toi, sur son portable, au lieu de te montrer sa collection de jolies filles à poil il te sort sa toute dernière collect... de motoneiges... Et il en est fier... Où va le monde !



Et sous une météo bien connue des pingouins, il me vient à la mémoire un tube portuse des débuts 90 et qui me laisse songeur... " Eu vou pra Jamaica, eu vou , eu vou, eu vou pra Jamaica eu vou agora eu vou..."

En chemin il m`a été donné de croiser des aventuriers de tout bord, des femmes et des hommes en quête de tout et de rien... Mais il en est qui suscitent le respect rien que par l`envergure de leur projet... Tel est le cas de Didier qui est venu au cap nord pour s`en aller chez lui, à Toulousse, avec pour seule attirail la musculature propre à la race des bipèdes et son bagage inspiré de l`ergonomie de l`escargot, sur lequel flotte, au vent, l`enseigne des amis de Jacques...
En son temps j`ai aussi été pèlerin et je connais la liberté du pas lesté par l`infini... Voici pour toi, mon ami Didier, mon plus grand souhait : Puisse chaque pas te distiller aimablement et ton chemin, quel qu`il soit, te mener à l`essentiel de l'existence... Bonne route pèlerin et je ne manquerais pas de venir te rendre visite à Toulouse pour que tu me comptes tes aventures...

Le lendemain j`ai eu le grand bonheur de faire la rencontre des "ResteAChouair" un couple de français de près de St-Etienne (Chouair ?)... Ils sont peut-être restés à Chouair toute leur vie mais ils n`auront pas attendu le deuxième mois de leur retraite pour lever le camp pour un petit tour au nord de l`Europe... Et lorsqu´ils te disent qu`ils n`ont jamais eu de télé tu comprends qu`ils ont eu le temps de profiter de celui que ça te laisse. Pour notre téléjournal je leurs ai donné des nouvelles de la Norvège et eux des pays baltes...
Pour vous, les jeunes, je vous souhaite... la pédale increvable !

Sur la route qui te mène à l`île du cap nord (à ne pas confondre avec l`île du cap vert... C`est pas au même endroit) il peux y avoir, des fois, un peu de vent... pendant 2... voir 3 km...

Et des fois ce vent, qui peux être violent... et pas forcement dans le dos... donne ceci :

A l`abri du vent, dans les fjords enclavés, il n´est pas exclu de trouver un pote à RobotCop atteint de la KernitoManie (maladie que présentent certains spécimens de la race humaine a foutre un tas de cailloux n`importe où pour dire qu`il sont passés par là... Cette maladie est désastreuse dans les endroits où l`orientation est assurée justement par ces tas de cailloux car tu finis toujours par visiter un ou deux endroits où un de ces malades est venu pisser un godet !)

Et plus tu t`approches du cap et plus ça sent la morue...

Et bon... Au sujet du Nordkapp soyons clairs tout de suite... Ce n`est ni le point le plus septentrional d`Europe ni le point le plus septentrional du continent Européen...

Mais bon, les anglais, commandés par le père Richard, qui se promenaient par là au 16 ème siècle à la recherche d`un passage maritime au nord pour l`inde (sont malades ces types... ils n`ont jamais compris qu´il faut laisser découvrir ceux qui savent découvrir... humm, humm ... Pour découvrir il faut jamais aller au nord... ça caille... vas au sud et tu rigoleras certainement d`avantage !) ont dû sans doute bataillé sévère contre ce cailloux pour pouvoir le contourner... Et bon... Il fallait bien lui donner un nom à ce machin... Et les anglais fort tièdes d`antan n`avaient pas la verve des portugens pour appeler cela "Le cap de bonne-espérance" (Et pan, dans les dents)... de tout façon l`espoir c`est pas ce qui y a le plus dans les parages... Alors bon... Ils ont trouvé North Cape... Comme North et Cape... ce qui jette finalement pas si mal dans les bouquins de géo lorsque c`est écrit en norvégien; Nordkapp...

Il existe en norvège une pelletée de caps nord dont les plus remarquables sont : le vrai, le faux vrai et le vrai faux...

Vous suivez ? Non ? Pas grave, la plus belle partie de l`histoire commence ici...

Le vrai faux est le plateau et la falaise du Nordkapp lui-même (71, 10´ 21")... celui-ci, accessible par la route, est, étonnamment, visité par quelques centaines de milliers de personnes par année (courte l`année, mai - août)... Son succès est sans doute dû à sa superbe cafétéria, ces bars à champagne et son balcon sur la falaise, nommé... "The king`s view"... Rien que cela... Si t`as le malheur de te pointer là autrement qu`à pied ou à vélo ou que tu sens un peu trop l`afther shave l`entrée te coûtera 200 nok (env. 40 CHF)... le norvégien est honnête mais pas con... Si tu veux du vent t`en auras mais il faut casser ta tirelire pour mettre du jus dans notre pompe a fric ! Expérience mythique surtout entre 21h00 et 1h00 du mat lorsque tu t`y retrouves avec la turistade qui débarque d`une vingtaine d`autobus pour venir assister au soleil de minuit... Ah, pas de pot, aujourd`hui il y a du "fog" à pas voir un cul à 1m... Mais... Soyez les bienvenus l`an prochain... Je me suis rarement autant marré...


Le faux vrai est le Knivskjelodden (71, 11´ 08")... Celui-ci est accessible depuis la route à quelques bornes du Nordkapp... Il y a un parking... Petit ce parking... Tiens, il n`y a pas de bus... Tiens, la turistade se résume à 10 pigmés par jours qui sont passés au fitnesse avant de venir... et tu t`envois 18Km aller-retour sur un sentier extrêmement bien balisé (avec une météo, par contre, qui peut être assez aléatoire) pour aller ici...

Et s`il te reste encore envie de batailler tu peux aller voir le vrai point le plus septentrional du continent européen... j`ai nommé le Kinnarodden (71, 08´01")... Pour ça tu descends à Lakselv et tu remontes à Menhamn (une petite bricole à 500 bornes... mais si t`es venu jusqu`ici tu n`est plus à ça près...)... Et tu t`envoies 48 km de marche aller-retour sur la lune... plus les détours... Ici tu peux toujours chercher la turistade... elle viendra pas... 10 chats mouillés par année... qui dit mieux... La différence entre le NordKapp et le Kinnarodden est ici... Le premier est relié au continent par un tunnel de 6,8 km et qui descend 212 m sous le niveau de la mer, le second par un lambeau de terre de 300m que la mer n`a pas encore su couvrir... C`est fou ces petits détails qui peuvent faire pédaler autant... qu`est-ce que t´en penses ?

Deux estoniens qui faisaient du stop au nord ouest de Lakselv pour rentrer chez eux m`ont dit :"Don´t go there man, it`s hard stuff... But if you go, go to the airport... there is a guy who knows all you need..."... Ma boite à outils bien remplie, par une très belle journée d`un 12 août, bâbord amures en bon plein (on va au nord avec ça ???), je m´arrache 138,25 Km sur la mythique 888 qui traverse toute la Nordkinnhalvoya (étape jamais égalée jusqu`à aujourd`hui)...

Et en attendant une météo bien connue des pingouins, il me vient à la mémoire un tube portuse des débuts 90 et qui me laisse songeur... " Eu vou pra Jamaica,..." Ah, non... mais non c`est pas ça... " Eu vou pra Laponia, eu vou, eu vou, eu vou pra Laponia eu vou agora eu vou..."

Et au nord est de Lakselv les bords du Porsangen fjord sont une surprenante leçon de géologie à ciel ouvert... Ici les âges ce mélangent et ce côtoient... Un retrait d`un dernier glacier... Un bord de mer pétrifié et une assemblée de blocs erratiques en attente d`une hypothétique prochaine subduction...

J`arrive à Menhanm international airport à 20h30 précises (pour le souper, quoi...)... Personne... Je sonne... Un type se pointe... je lui déballe mon histoire d`estoniens et comme quoi il était le maître des lieux... Flatté, il me dit qu`il a bien une carte mais qu`il peut pas me la photocopier... Je lui demande alors si je peux en faire une photo...

Avant que je quitte l´aéroport, d´un ton paternaliste, le gaillard me dit encore : " What´s your bike... If it`s steel there in 2 days I will looking for you... and you wouldn`t be the first one..."... Et il me montre encore sur la carte deux sommets où il y a du réseau... Au cas ou... A 21h30, après avoir largué l`excès de bagages dans une consigne de l`aéroport je me suis donc mis en quête du Kinnarodden au zoom de Optio... Juste absolument... insuffisant !

Et après 3h de cache cache avec des kern et autres silhouettes qui n`en n'étaient pas le soleil réapparaît à l`horizon et moi... je vais me coucher !

Le lendemain, perdu sur ce plateau désertique (où il existe quand même quelques sapins... mais il faut se mettre à genoux pour les voir...) à la recherche d`un tas de cailloux plus prononcé qu`un autre, je finis par me voir pousser les attributs des seuls habitants des lieux...

Et après avoir visité tous les caps du coin je le vois enfin... J`y suis pas encore mais il est là...

Après une trentaine de bornes de marche, si tu t`es pas trop perdu, t`arrives au Kinnarodden d`où il est possible de voir, au loin, l`île Mangeroya avec la falaise du NordKapp et le Knivskjelodden...

Me voici donc, jeunes gens, mes amis, fidèles compagnons, encore au tournant d`un cap...
Une pelletée de kilomètres au compteur, plus d`heures le cul sur une selle que ce qu´il m`aura fallut pour concrétiser mon travail de fin d`études... A ne plus savoir si c`est le cul qui a la forme de la selle ou la selle qui a la forme du cul... Voila des plombes que les coutures arrière de mon short ne sont plus d`origine... et voila un nombre de tours de pédale dont je ne saurais retenir le nombre (mais je peux te dire qu`il y en a eu plus de 2, sinon je m`en souviendrais...) et me voila sur ce bout de cailloux : 300 m de hauteur me séparent de la mer et devant... L`horizont... Rien...
Voila mes amis en quoi se jour est extraordinaire... Ici tu ne viens pas faire quelque chose... Ici tu viens faire part des choses...
Il n`y a rien à faire mais il y a tant à être... et cette petite place vaut tout l`or du monde...
J`y suis reste un jour... peut-être deux... à voir passer... personne !

Dans un si long chemin on y laisse forcément des plumes... C`est ici que j`ai laissé la mienne... Celle de Lauraine qui aura soutenu tant de mes virages...
Je l´ai offerte à Odin pour m`avoir épargné de venir à sa table, et à Thor (pas à Travers) pour m`avoir fait soufflé un vent du tonnerre dans la face pendant tant et tant de kilomètres... Ça m`aura épargné un abonnement au fitnesse, séché la tente et gardé ma tête hors et dans les nuages...
Un dernier regard sur ce bout de rien... J`ai pris la Ferraroli par le guidon et tendrement je lui ai dit : " Viens mon amie... Rentrons à la maison faire une grillade...
C`est ainsi que "Go2North" est devenu "TheSouthQuest" et "TheNDude" est devenu "The man on his way home"...

Et de retour au départ du sentier qui mène au "Kinnarodden", sur le pilier en granite, j`ai laissé un message à l`intention du prochain rigolo qui viendra user ces semelles et s`échauffer les pieds sans jamais se douter de ce qui l´attend :

"My dear friend,

At the top of the kern of the Nordkyn you will maybe see a feather... That feather comes from Lauraine in France near the border with Luxembourg... I was coming north with my bike when I saw her hitchhiking nearby the road... I give her a run around France, Luxembourg, Belgium, Netherlands, Germany, Denmark, Sweden and finally Norway until here. If you feel it, give her a new ride to main values of our lives :

Adventure and freedom ! "

Et plus loin, au sud est de Tana, j`ai quitté la Norvège sous les belles couleurs de la laponie avec un pincement au coeur... Pendant pas mal de temps ce pays a été pour moi une maison exemplaire...

J`ai croisé la Norvège tout azimut de Halden à Neiden sans jamais croiser un policier, un militaire, un type en cravate, un McDonald`s... Ce pays n`appartient pas à l`Europe car il est une parenthèse dans le monde...
Le norvégien est humble et modeste et peut faire son travail de manière extrêmement efficace habillé en training... Et si tu lui serres la main tu sens souvent l`amitié...
Le norvégien connaît bien la nature de sa place dans la Nature et son pays, immaculé, est le reflet du respect qu`on lui accorde...
Le norvégien semble, surtout, ne pas encore avoir oublié une des lois fondamentales du grand jeu :
Tout est permis mais rien n`est transgressé !
Je pars le coeur serré mais dans ma "Dead list" il y a beaucoup de références à cette terre... Il est vraiment fort probable que nos chemins viennent à ce recroiser un de ces jours...
Et à présent laissons nous guider par le Näätämöjoki pour aller voir qui sont donc ces Suomis derrière leurs arbres...

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